Les dystopies ou contre-utopies

Image de Les dystopies ou contre-utopies
Le terme dystopie ou contre utopie a toutes les qualités pour tenir le rôle d’opposant à celui d’utopie. Cependant il n’en présente pas nettement une notion contraire. La dystopie ne pose pas en effet comme principe ce qui serait vraiment l’opposition à l’utopie, à savoir le malheur pour tous, mais plus simplement une conception différente de la relation sociale fondée sur la domination d’une masse par une élite. Il en résulte une utilisation et une circulation des énergies qui diffèrent. Dans l’utopie la soumission à l’ordre général, autrement dit au dogme, est non seulement accepté par tous mais irréversible, rendant ainsi toute idée même de subversion irréaliste. Dans les dystopies au contraire le bonheur est réservé à la seule élite dominante qui doit consacrer une grande partie de son attention à prévenir toute forme de rébellion qui mettrait en danger son statut de dominant.


Utopie et dystopie ont pourtant en commun leur totalitarisme. Les premiers figeant toute progression sociale au nom d’un état figé et immuable, le second au nom de l’intérêt d’une minorité. Cependant si les absolutisme utopien sont souvent dus à une forme de naïveté et restent en majorité attachés à des œuvres littéraires, ceux des dystopies sont destinés à asservir, corrompre, et réduire toute forme de résistance à l’autorité.

De ce fait si utopie et dystopie semblent souvent utiliser les mêmes méthodes, leurs finalités diffèrent. Ainsi par exemple, alors que dans les utopies l’attachement est combattu pour éliminer les sentiments de propriété et les réactions égoïstes qu’il génère, dans les dystopie cet attachement est combattu d’une part pour détruire toute individualité et d’autre part toute possibilité de former des clans qui sont des sources potentielles de résistance. Comme dans les utopies les dystopies vont s’attaquer à toutes les causes d’attachement, la famille, les amis, les associations et surtout le sexe. Très souvent les sociétés dystopiques vont élever des interdits et des tabous sur les relations sexuelles car elles sont un des motifs d’aliénation le plus puissant. Cependant le nec plus ultra des méthodes de soumissions sera de parvenir à une présélection naturelle des individus afin qu’ils soient génétiquement conformés à accepter leur servitude. (Bienvenue à Gattaca, film d’Andrew Niccol-1997).

Cette stratégie eugéniste apparaît clairement dans « Le meilleur des mondes » de Huxley où les embryons humains destinés à « approvisionner » les classes subalternes subissent des traitements chimiques destinés à interrompre leur évolution. A cette conformation physique s’ajoute un système d’apprentissage hypnotique qui finit son travail. Ainsi les Delta et Epsilon (castes inférieures) sont dressés à admirer les classes supérieures (les Alpha), ce qui détruit en eux tous risques de jalousie et par conséquence de rébellion, d’autant plus que cerise sur la gâteau, le Soma, cette drogue sans effet secondaire, permet à chacun de parvenir à un état de bonheur compensatoire d’un sommeil paradisiaque encadré par le système et donc inoffensif. Une autre caractéristique des fictions contre-utopiques est d’insister davantage sur les méthodes d’aliénation des masses que sur les objectifs des castes dominantes. On ne sait d’ailleurs pas toujours qui sont ces dominants parfois cachés derrière un Big brother (1984 d’Orwell) ou un UNI-ord, l’ordinateur caché sous les Alpes abritant en réalité une caste mystérieuse de programmateurs. (Un bonheur insoutenable d’Ira Levin). Cet anonymat n’est pas innocent car l’objectif des auteurs est d’attirer notre attention sur les masses qui sont par leur faiblesse, leur ignorance, leur bêtise, et surtout leur naturelle soumission, les propres artisans de leur sort. Par ce système la contre-utopie comme l’utopie communiquent avec leur contemporains et leur transmettent une analyse critique de leur époque, éveiller leur conscience et faire tomber les enchainements mentaux qui les emprisonnent.


Lire la suite ...   

Partager sur facebook