Picatrix (Le But du Sage)

Le Picatrix
écrit par al-Majriti, Maslamati ibn Ahmad (Maslama Al-Maǧrīṭī)  


La Ghâyat al-Hâkim fi'l-sihr, plus connue en occident sous le nom de Picatrix, est un texte important de la magie arabe. Il est peut-être le plus grand et le plus complet des grimoires ou des manuels de magie. L'écriture de cette œuvre est attribuée au mathématicien andalou al-Majriti (ou al-Madjriti), (939-1004). La date de sa traduction latine est fixée à 1256 par la cour d'Alphonse le Sage, roi de Castille. Il a exercé par la suite une influence considérable sur la magie occidentale. On dit qu'une grande partie de la magie astrale de Ficin dérive du Picatrix. Le Picatrix est mentionné par Johannes Trithemius dans le Livre 2 de son fameux Steganographia (1500) et dans son Antipalus Maleficiorum (1500). Un exemplaire (conservé à la British Library, Sloane) aurait été transmis de Simon Forman (mort en 1611) à Richard Napier (décédé en 1634) puis à Elias Ashmole (mort en 1692) et ensuite à William Lilly (d. 1681).

EM Butler associe à tort le Picatrix avec Gio. Peccatrix, (sans doute un pseudonyme) qui a édité une version italienne de la Clé de Salomon (British Library, Sloane manuscrit 1307). Trompé par certains commentaires des uns et des autres, le Dr Butler a conclu à tort que le Picatrix était « une édition italienne de La Clavicule, fortement imprégné d'éléments noirs » (rituel magique, 1949, p. 135.).

De la version castillane il ne reste que quelques bribes. Mais l'originale en Arabe a été découverte vers 1920 par l'orientaliste et bibliothécaire Wilhelm Printz, et traduite en allemand par Helmut Ritter et Martin Plessner en 1933. Pour cette raison, le Picatrix est très connu en Allemagne alors qu'on le découvre en France depuis seulement quelques années. Le titre en français est « Le But du Sage » (ou l'Objectif du Sage). Il en existe une traduction française très controversée qui date de 2003, publiée sous le titre « Picatrix. Un traité de magie médiéval ». Cette traduction a été réalisée par Béatrice Bakhouche, Brigitte Pérez-Jean et Frédéric Fauquier à partir de l'édition latine. On lui reproche une méconnaissance de la magie et d'avoir traduit le latin technique du Moyen-Âge sans tenir compte que l'original était beaucoup plus antique, ce qui engendre beaucoup d'erreurs d’interprétations.

 
 

Comment se présente le Picatrix ?

al-Majriti
L'auteur du Picatrix : Maslama al-Majriti
Les paragraphes suivants sont conçus comme un guide et un résumé de ce livre de magie arabe souvent désordonné. Un coup d’œil à la table des matières est suffisant pour montrer que la séquence des chapitres est erratique et un examen plus approfondi révèle que la portée des différents chapitres est beaucoup plus large qu'il n'y paraît à première vue. Les doctrines philosophiques (qui, selon l'auteur, sont à la base de l'art talismanique), la théorie de la magie, l'astronomie, l'astrologie et les traditions physiques, les recommandations générales pour la pratique de l'art magique, et les comptes-rendus des peuples par lesquels elle est employée se retrouvent pêle-mêle dans le livre, sans aucune logique discernable. Si un arrangement systématique est perceptible, il se retrouve dans le matériau astrologique et astronomique, bien que même cela est loin d'être autonome ou méthodiquement ordonné. Les sujets qui vont ensemble se retrouvent séparés (par exemple, les sections géographiques en pages 171 et 394). Les définitions discursives sont longues, apparaissant dans des endroits inattendus, et brisent la séquence (par exemple, page 78 et 343). Elles rendent ainsi la tâche du lecteur plus difficile.

Cette manière d'écrire pourrait bien être intentionnelle, par exemple pour faire en sorte que les sections magiques apparaissent moins suspectes en les entrelaçant avec des passages théoriques, ou pour faire en sorte que certaines doctrines semblent moins étranges en les administrant à petites doses, ou encore pour démontrer la validité équivalente de la magie et de la philosophie. C'est peut-être aussi une combinaison de ces trois raisons. Ou alors c'est un simple recueil de documents divers et variés, sans aucune intention de les trier. Dans tous les cas, une méthode similaire de présentation est apparue dans l'une des principales sources de l'objectif du Sage, l'encyclopédie des Frères de la Pureté (Ihwân al-Safâ).

Ce qui suit est une enquête sur l'ensemble de l'ouvrage, avec une esquisse des sources, dans la mesure où elles peuvent à présent être identifiées. Aucune tentative n'a été faite pour imposer un ordre logique sur l'illogisme du livre.

Le Picatrix

Picatrix - LIVRE I

Dans la préface, après une brève autobiographie, l'auteur nous donne sa raison d'écrire ce livre. Il s'agit de faire la lumière sur la nature de la magie, un secret bien gardé par les anciens philosophes. Il ajoute un résumé du contenu de ses quatre livres. Ceci est remplacé, dans certains manuscrits, par une liste détaillée du contenu, organisé par chapitre, un genre de table des matières.

Chapitre 1 : Où il est question de l'importance de la philosophie,

d'une part pour la compréhension des choses divines, naturelles et morales, et d'autre part comme prémisse pour la magie. Dans la première section se trouvent les échos verbaux de classification d'al-Farabi des Sciences et les doctrines néo-platoniciennes de la pseudo-Empédocle. Le chapitre se termine par un excursus sur la définition de certains concepts logiques, suggéré par le mot conclusio.


Chapitre 2 : Où on a droit à une définition de la magie selon le Ihwân al-Safâ

et de celle des talismans selon Jabir ibn Hajjan. Le talisman est comparé à l'élixir des alchimistes. La magie est divisée en deux parties, théoriques et pratiques, la première étant limitée à la connaissance des cieux (avec la parenthèse que la parole est une sorte de magie) et la seconde consiste à faire usage des règnes de la nature, des animaux, des légumes et des minéraux. Ce principe de la discrimination réside pour l'agencement de l'ensemble des travaux. Le chapitre se termine par certaines questions astronomiques et astrologiques.


Chapitre 3 : Qui traite des raisons pour lesquelles les cieux sont de forme sphérique,

composés de différentes couches (plans), et compare la puissance des plans astraux avec celle des planètes. Certains passages sont liés au Kitâb al-Baht de Jabir qui contribuera plus tard au But du Sage.


Chapitre 4 : Où il est rappelé que l'utilisation réussie des talismans dépend de celui qui les utilise en conjonction avec un positionnement correct des constellations

Magie astrale Arabe
La magie astrale Arabe
L'auteur donne une liste descriptive des vingt-huit maisons de la lune, selon le système «Indien», et attribue à chacune son bon talisman. L'analyse de ce chapitre montre qu'il est un composé de doctrines «indiennes», des principes de Dorotheus de Sidon et des éléments d'une liste attribuée à Hermès (attestées par Ihwân al-Safâ' ). Au début du chapitre, l'auteur informe le magicien de la nécessité de se préparer intérieurement pour sa tâche. Il est ensuite mis en harmonie avec la disposition inhérente à diverses substances naturelles ayant la capacité d'absorber les influences magiques. L'auteur nous fait part de suggestions quant à la position de la lune favorable pour certaines entreprises. Il ouvre la section finale avec sa formule habituelle nous annonçant, après chaque digression, qu'il est de retour au véritable sujet de son livre.
 

Chapitre 5 : Dans lequel est élargit la discussion au sujet des Maison lunaires

Trente-et-un exemples de constellations d'une autre nature nous sont donnés, favorables à la fabrication de talismans. Certains de ces talismans sont décrits, mais aucune indication n'est donnée sur la façon de les rendre efficaces, un sujet qui occupera plus tard une grande partie du livre. Insérée dans le milieu de la discussion se trouve la liste des différents effets relatifs à divers aspects. Suivent des remarques sur la dépendance des talismans par rapport aux corps célestes et l'importance de la concentration du magicien et de son énergie vers son but. On y trouve également deux extraits d'un traité attribué à Aristote, qui sera ensuite cité entièrement dans le livre IV. Des exemples sont donnés de la « conjuration » de talismans pour les rendre efficaces. Ces formules sont également présentes dans le Ihwân al-Safâ où elles sont attribuées à Hermès. Ceci complète la formation pratique donnée dans le Livre I. Puis vient un post-scriptum et le chapitre se termine par une évaluation de la magie et de l'alchimie.

Les deux derniers chapitres du livre I sont entièrement consacrés à la philosophie. Mais au premier abord seulement... A vous d'en comprendre la véritable substance cachée...

Chapitre 6 : Traité de la nature de l'homme

Picatrix - Livre I
Illustration du Picatrix
Partant du principe que l'homme est un microcosme, l'auteur commence par une énumération des caractéristiques qui font que l'homme est supérieur à toutes les autres créatures. Il donne ensuite les correspondances familières entre les parties du corps humain et ceux du macrocosme. Bien qu'au début il n'y a que des réminiscences du lhwân al-Safâ, nous trouvons bientôt des pages entières qui sont identiques à ce travail, et, en partie, avec l'ouvrage édité par Goldziher : Le Livre de l'essence de l'âme (Kitâb ma`ânî al-nafs). L'être humain comme il est effectivement trouvé sur la terre est représenté à dépendre de son idée, l'homme universel, et cette dépendance est illustrée par une succession d'hypostases. Ce passage fait échos de multiples propositions néo-platoniciennes et pseudo-Empédocle que l'on peut facilement identifier, mais le passage dans son ensemble n'a pas été jusqu'ici clarifié de façon satisfaisante. L'auteur déclare expressément que ce sixième chapitre n'est pas une digression mais qu'il traite plutôt de l'essence de la magie, par laquelle il signifie clairement que la chaîne des hypostases prouve un lien entre le haut et le bas monde, le principe de choix dans l'art de la magie. Une mention particulière est faite de l'obscurité avec laquelle les anciens ont fait un examen superficiel de la magie et de la nature essentielle de la connaissance et du mode d'étude. En clair : il ne faut pas négliger les principes premiers ni la substance fondamentale.
 

Chapitre 7 : Où notre auteur retrace la grande chaîne de l'évolution

On y trouve les idées de l'auteur sur ce qui ne peut pas encore donner leur juste place dans l'histoire de la pensée néo-platonicienne. Il revient ensuite plus en détail sur le concept de Hyle et sa place dans la chaîne de l'évolution. La discussion sur ces sujets théoriques étant justifiée par le fait qu'ils « corrigent la compréhension et aiguisent l'appréhension ». C'est très subtil, vous ne trouvez pas ?

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