Au Tibet, le chabéron s'exalte aux chants cadencés des lamas, ses confrères, jusqu'au
délire extatique, puis il s'ouvre le ventre avec un coutelas, extrait ses entrailles et les laisse reposer sur la table qui est devant lui. Après une heure ou deux de cette torture, à laquelle il parait insensible et pendant laquelle il prophétise et répond aux questions qui lui sont adressées, il remet ses entrailles en place, rapproche les lèvres béantes de sa blessure, les contient avec une main et y passe l'autre comme pour les frictionner une fois. La plaie est refermée et cicatrisée. Les chants reprennent au diapason où ils s'étaient arrêtés et redescendent graduellement jusqu'à la note la plus basse. Le bokte, c'est-à-dire le saint, est alors démagnétisé et rentre dans la vie commune. Il s'en retourne au bras de ses confrères, pâle et affaibli par la perte énorme du sang qu'il a faite, mais sans qu'il en reste d'autre souvenir, ni qu'il en résulte d'autre accident. Ce spectacle est souvent offert aux populations du Tibet et de la Tartarie, qui en sont toujours très avides.