Pratique du vaudou à la Nouvelle-Orléans

Le Voodoo à la Nouvelle Orléans
A la Nouvelle-Orléans, tout le monde peut pratiquer le Voodoo. Il n'y a pas de rite formel religieux d'initiation, aucune orthodoxie rigide, et il n'y a pas de norme dans les façons de pratiquer ce culte. Le Voodoo est un fluide, adaptable, syncrétique, et incluant des pratiques spirituelles et religieuses qui embrasse les cœurs de tous les gens, quelle que soit leur race, leur croyance ou leur origine. Les loa, les esprits, ou les mystères, tous les termes utilisés pour décrire les forces spirituelles archétypales divines du Voodoo, sont interchangeables, manifestant une infinité de manières de pratiquer le Voodoo en fonction de la culture de chacun et de ses origines géographique.

Parce que la Nouvelle-Orléans était un grand port où plusieurs cultures ont convergé, les influences du Voodoo de la Nouvelle-Orléans sont très diverses et différentes. Par exemple, on y retrouve la Santeria d'inspiration cubaine, l'initiation des Mambos et des Hougans comme à Haïti, les hommes Obeah des îles des Antilles (à savoir Belize, les Bahamas, la République Dominicaine), les adeptes des esprits de différentes Églises, le Hoodoo qui intègre les sorts et les superstitions, et les adeptes de la tradition Yoruba du Nigeria. Le Voodoo de la Nouvelle-Orléans est également influencé par la spiritualité et l'herboristerie amérindienne. Par exemple, le célèbre Chef indien Black Hawk est considéré comme un Saint Voodoo et est souvent inclus dans les travaux rituelliques.

Néanmoins, la langue du vaudou de la Nouvelle-Orléans est le Créole français de la Louisiane.

Les influences et les différences par rapport au vaudou d'Haïti

Alors que le Voodoo de la Nouvelle-Orléans est largement influencée par le Vaudou de la religion d'Haïti, ce n'est pas la même chose.

Le Voodoo de la Nouvelle-Orléans, également connu sous le nom de Voodoo Créole ou de Vaudou de la Louisiane, provient des religions ancestrales de la diaspora africaine. Il est l'une des nombreuses incarnations des religions basées en Afrique enracinées dans la tradition ouest-africaine du Vodun du Dahomey et les traditions d'Afrique centrale retrouvées dans vaudou haïtien. Il est devenu syncrétique avec la religion catholique à la suite des migrations massives forcées et de la traite des esclaves.

Un peu d'histoire de l'esclavage

Esclave enchainé
Le Voodoo a été importé en Louisiane française au cours de la période coloniale par les travailleurs et des esclaves en provenance d'Afrique de l'Ouest. De 1719 à 1731, la majorité des captifs africains déportés comme esclaves à la Louisiane étaient originaires du peuple Fon de ce qui est maintenant le Bénin. D'autres groupes tels que les Bambara, Mandinga, Wolof, Ewe, Foulbé, Nard, Minajjhhhjjii, Yoruba (Nago), Chamba, Congo, Ibo, Ado, Hausa et Sango (Hall) ont également apporté leurs pratiques culturelles, leur langue et leurs croyances religieuses enracinées dans l'esprit et le culte des ancêtres. Tous ces groupes ethniques sont responsables du développement du Voodoo de la Louisiane. Leur connaissance en herboristerie, en poisons, et la création rituelle de charmes et d'amulettes destinés à se protéger ou de nuire à autrui sont devenus des éléments clés du vaudou de la Louisiane. Beaucoup ont aussi été des Fon pris comme esclaves à la colonie française de Saint-Domingue dans la mer des Caraïbes. Le Voodoo de la Louisiane existe depuis le début des années 1700.

La communauté des esclaves a rapidement mis en infériorité numérique les colons blancs. La colonie française n'était pas une société stable lorsque les esclaves africains sont arrivés, et c'est ainsi que les Africains nouvellement arrivés ont dominé la communauté des esclaves. Selon un recensement de 1731-1732, le ratio des esclaves africains par rapport aux colons européens était de plus de deux contre un. Comme un nombre relativement restreint de colons étaient planteurs et propriétaires d'esclaves, les Africains étaient parqués dans de grands groupes, ce qui leur a permis la préservation des pratiques et de la culture africaine. Contrairement à d'autres états se trouvant plus au nord, où les familles d'esclaves étaient souvent divisées entre les différentes plantations, dans le sud de la Louisiane les familles, les cultures et les langues ont été maintenus plus intact. En vertu du code français et de l'influence du catholicisme, la vente d'enfants esclaves loin de leur famille est interdite s'ils ont moins de quatorze ans.

Le syncrétisme avec le catholicisme

Les propriétaires d'esclaves interdisaient aux Africains de pratiquer le Vodou sous peine de mort et, dans les zones contrôlées par les catholiques, ont forcé beaucoup d'entre eux à se convertir au catholicisme. Le résultat a été une créolisation des noms et des aspects des esprits vaudou avec ceux des saints chrétiens qui ressemblent le plus étroitement à leurs domaines d'expertise ou de puissance. Sous le couvert du catholicisme, le vaudou a survécu en tant que religion.

La mortalité élevée due à la traite des esclaves a fit naitre chez les survivants un sentiment de solidarité et d'initiation. L'absence de fragmentation dans la communauté esclave, ainsi que le système de parenté produit par le lien créé par les difficultés de l'esclavage, a donné lieu à une « communauté fonctionnelle cohérente, bien intégrée, autonome et confiante en l'esclavage. »

Quelques caractéristiques du Voodoo de la Nouvelle-Orléans

Sachet gris-gris
Un sachet gris-gris
Le Voodoo de la Nouvelle-Orléans est connu pour plusieurs caractéristiques uniques, telles que des poupées vaudou, les gris gris, les reines Voodoo et les zombies.

La pratique consistant à faire et à porter des talismans et des amulettes pour la protection, la guérison, ou pour causer le mal aux autres était un aspect clé au début du Voodoo de la Louisiane. Le Ouanga, un charme utilisé pour empoisonner un ennemi, contenait les racines toxiques du Figuier maudit. Il s'agit d'un arbre apporté d'Afrique et préservé en Louisiane. La racine était combinée avec d'autres éléments, tels que les os, les ongles, les racines, l'eau bénite, des bougies saintes, des encens d'église, du pain bénit, ou des calvaires. L'administrateur du rituel évoquait fréquemment la protection de Dieu et de Jésus. Cette ouverture de la croyance africaine a permis l'adoption de pratiques catholiques dans le Voodoo de la Louisiane.

Le Voodoo de la Nouvelle-Orléans se distingue des autres formes de Vaudou en raison de plusieurs autres caractéristiques uniques. Par exemple, à la Nouvelle-Orléans, le Voodoo a évolué pour embrasser les aspects du spiritisme au XIXe siècle. La religion « spiritual » de la Nouvelle-Orléans est un mélange de spiritisme, de Voodoo, de catholicisme et de pentecôtisme. C'est un cas unique parmi les religions afro-américaines « spirituelles » dans son utilisation de « guides spirituels » dans les services de culte et dans les formes de possession rituelles que ses adeptes pratiquent. Le vaudou a influencé les « Eglises spirituelles » qui survivent dans la Nouvelle-Orléans et sont le résultat d'un mélange de celui-ci avec d'autres pratiques spirituelles.

Une autre composante du Voodoo de la Louisiane, elle aussi importée d'Afrique de l'Ouest, est la vénération des ancêtres et l'accent mis sur le respect des aînés. Pour cette raison, le taux de survie chez les populations asservies âgées était plus élevé dans la zone du créole de la Louisiane.
 

Les poupées vaudou de la Nouvelle-Orléans

Poupée Voodoo
L'utilisation de poupées vaudou à la Nouvelle-Orléans aurait atteint un sommet pendant le règne de l'infâme Marie Laveau, la reine vaudou de la Nouvelle-Orléans. Les poupées vaudou sont créés comme des gris gris. C'est en quelques sortes une forme de magie talismanique. Le mot gris-gris signifie gris, désignant ce qui se trouve entre le noir et le blanc. Gris Gris est à la fois un nom et un verbe, se référant à un objet rituellement préparé comme une poupée ou un petit sac en tissu rempli d'ingrédients magiques, ainsi que le fait de travailler le gris gris (réaliser un rituel magique). Traditionnellement, les poupées vaudou sont créées pour représenter une divinité ou pour abriter un esprit.

Bien qu'elles soient le plus souvent représentées comme des objets de vengeance, la plupart des praticiens de Voodoo font un effort concerté pour dissocier les poupées vaudou de l'utilisation malveillante. Environ 90% de l'utilisation des poupées vaudou à la Nouvelle-Orléans est en effet centré sur la guérison, trouver le véritable amour, les conseils spirituels. A la Nouvelle-Orléans, les poupées vaudou sont largement vendus comme souvenirs, bibelots et articles de mode.

Les zombies du Voodoo

La croyance aux zombies est un aspect exceptionnel du Voodoo de la Nouvelle-Orléans. Un zombie est un mort qui a été ranimé après avoir été enterré. Après la résurrection, le zombie reste sous le contrôle des autres, il ne possède pas sa propre volonté.

En vérité, un zombie est une personne vivante qui n'est jamais morte ; au contraire, elle est sous l'influence de puissants médicaments administrés par un sorcier maléfique. Bien que beaucoup de gens croient aux zombies, peu en ont jamais vu un seul, bien qu'il y ait quelques cas enregistrés de personnes qui ont prétendu être des zombies.

L'une des caractéristiques du Voodoo de la Nouvelle-Orléans est « Li Grand-Zombi ».

Les Reines de Voodoo

Les États-Unis ont voté la loi de l'Embargo de 1808 mettant fin à toute importation d'esclaves africains aux États-Unis. Les Reines de Voodoo étaient connues pour exercer un grand pouvoir dans leurs communautés, et elles ont joué un rôle de premier plan dans de nombreuses réunions, cérémonies et danses rituelles. Celles-ci ont attiré des foules par centaines de milliers de personnes. Elles ont été considérées comme des pratiquantes qui vivaient grâce à la vente et l'administration d'amulettes, de « gris-gris », de charmes et de poudres magiques, ainsi qu'en jetant des sorts et des charmes qui garantissaient aux malades la guérison, exauçait leurs désirs, et permettaient de combattre ou de détruire ses ennemis. Leur pouvoir et leur influence étaient largement répandue et largement incontestable, reconnu par les journalistes, les juges, les criminels et les citoyens. Ces femmes d'origine africaine et créole étaient des leaders puissants dans une société qui a maintenu un régime esclavagiste oppressif et une dichotomie de la liberté entre Noirs et Blancs. Leur influence a été également liée à l'histoire ancienne de la ville, dans laquelle « une pénurie de femmes blanches a donné lieu à un nombre élevé de liaisons inter-ethniques. » Comme dans d'autres communautés coloniales françaises, une classe de gens de couleur libres s'est développée et à qui ont a donné des droits spécifiques. A la Nouvelle Orléans, ils ont acquis la propriété et l'éducation. Les femmes de couleur libres avaient une quantité relativement élevée d'influence, en particulier sur ceux qui étaient des chefs spirituels. En outre, les traditions religieuses d'Afrique centrale et de l'Ouest, d'où un grand nombre de coutumes vaudous sont dérivées, ne pouvaient être maintenues qu'à la condition que les femmes exercent un pouvoir extraordinaire.

Marie Laveau
Marie Laveau - Prêtresse Voodoo
Parmi les quinze « reines vaudous » se trouvant dans les quartiers dispersés autour de la Nouvelle-Orléans du 19ème siècle, Marie Laveau était connu comme "LA" Reine Voodoo, la plus éminente et la plus puissante de toutes. Son rite religieux sur la rive du lac Pontchartrain, la veille de la Saint-Jean en 1874, a attiré quelque 12.000 personnes, des noirs comme des blancs. Il a été dit que les politiciens, les avocats, les hommes d'affaires, les riches planteurs, sont tous venus la consulter avant de prendre une décision financière ou commerciale importante. Elle a également vu les pauvres et les esclaves. Bien que son aide semblait non discriminatoire, elle peut avoir favorisé les serviteurs asservis de ses « riches clients influents ». De nombreux esclaves fugitifs créditaient leurs évasions réussies à des charmes puissants de Marie Laveau. Cette dernière a ensuite dominé les autres leaders vaudou de la Nouvelle-Orléans. Etant aussi catholique, Marie Laveau a encouragé ses partisans à assister à la messe catholique comme un moyen stratégique pour protéger leurs vraies croyances. Son influence a contribué à l'adoption de pratiques catholiques dans le système de croyance Voodoo. Marie Laveau est connue pour son habileté et sa compassion pour les moins fortunés.

Marie Laveau a également acquis une influence sur sa clientèle par son travail dans un salon de coiffure. Elle connaissait tous les ragots de la ville. Ses clients sont aussi venus à elle pour lui acheter des poupées vaudou, des potions, des sacs gris-gris, et d'autres choses. Son influence continue à planer sur la ville encore aujourd'hui. Au 21e siècle, sa tombe dans le plus vieux cimetière est une attraction touristique majeure. Les croyants au Voodoo viennent ici pour offrir des cadeaux et prier pour son esprit. En face du cimetière où Marie Laveau est enterrée, des offrandes de gâteau sont laissées aux pieds de la statue de Saint Expedite ; ces offrandes sont censées accélérer les faveurs de la reine Voodoo. Saint Expedite représente l'esprit debout entre la vie et la mort. La chapelle où la statue se dresse était autrefois utilisée uniquement pour la tenue de funérailles. Marie Laveau continue d'être une figure centrale du voodoo de la Louisiane et de la culture de La Nouvelle-Orléans. Les joueurs crient son nom en lançant des dés, et de multiples récits d'observations de la reine vaudou ont été rapportés.

L'envoûtement vaudou et le Hoodoo

L'envoûtement vaudou est couramment utilisé par les habitants de la Louisiane pour décrire la marque unique du Voodoo Créole de la Nouvelle-Orléans. Certains praticiens Hoodoo intègrent des éléments de Voodoo, et certains ne le font pas. Le Hoodoo n'est pas pareil que le Voodoo et le Voodoo n'est pas le Hoodoo. Ce sont deux choses différentes mais pourtant complémentaires. La distinction entre le Voodoo et le Hoodoo est que le Hoodoo intègre à la fois la magie blanche et la magie noire. Le Voodoo est une religion ; Le Hoodoo, c'est de la magie. Pourtant, il existe un chevauchement des deux, la plupart du temps, particulièrement à la Nouvelle-Orléans.

Sources :
The Voodoo Hoodoo Spellbook par Denise Alvarado (2009)



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