Sorcellerie à la Réunion

Ile de la Réunion
Sur l'île de la Réunion la magie et la sorcellerie perdurent depuis des centaines d'années. Trois types de sorcelleries cohabitent dans l'île Bourbon et correspondent aux grandes ethnies qui peuplèrent l'île. La pratique de la sorcellerie à La Réunion fut introduite en même temps que les esclaves déportés. Certains d'entre eux avaient des connaissances en médecine et en herboristerie et d'autres étaient maîtres dans les arts divinatoires et les incantations magiques.

C'est ainsi que la magie blanche et la magie noire se répandirent sous différentes formes. On trouve des « devineurs », des « gratteurs ti bois », des guérisseurs et des préparateurs de tisane, surnommés des « tisaneurs », aux côtés des rebouteux, des « batteurs de bobine », des traiteurs et d'autres spécialités issues des croyances populaires et des religions variées. Tout ceci se pratique toujours à l'heure actuelle et cette coexistence se passe sans problèmes, formant un éventail de solutions pour répondre facilement aux problèmes et aux désirs de chacun.

La Réunion mystérieuse n'est plus à démontrer. Rien ni personne n'a réussi à enrayer ces pratiques ancestrales qui cohabitent maintenant avec la médecine traditionnelle et la médecine chinoise. Il est temps pour nous de lancer un coup de projecteur sur ces pratiques pour les décortiquer dans le détail.

 

Les guérisseurs réunionnais

L'une des demandes les plus importantes de la population concerne la guérison de maladies. C'est là que les sorciers guérisseurs interviennent. L'une des causes possible de l'importance des pratiques de guérison occulte à la Réunion provient peut-être de la sous-médicalisation qui a longtemps régné dans l'île et même encore aujourd'hui par rapport à la Métropole.

Pour les réunionnais qui ont recours à un guérisseur ils vont le consulter dans le but d'obtenir des préparations à base de plantes, souvent des tisanes, qui peuvent guérir aussi bien des maladies physiques que des maladies psychiques. Ces dernières entrent dans l'ensemble des maladies mystérieuses qui sont souvent attribuées au mauvais œil ou à un mauvais sort. Le sorcier ne se limite donc pas à l'herboristerie et il est capable de prescrire des amulettes porte-bonheur, d'effectuer des rituels pour garantir ses patients contre les attaques de mauvais esprits d'accomplir de la divination de manière préventive.

Certains sorciers peuvent même être consulté pour prédire l'avenir, accéder à une promotion professionnelle ou jeter un sort contre un ennemi.

Chaque sorcier réunionnais permet de se distinguer par rapport à certaines compétences particulières.

Les compétences des sorciers réunionnais

Il est possible de classer les sorciers réunionnais par rapport à un ensemble de compétences précises qui sont les suivantes :

Sinp : Ce terme provient du français « simple ». Il désigne des gens capables de concocter des remèdes à base de plantes médicinale.

Tréter : Ce terme désigne les sorciers qui sont en mesure de traiter une maladie. Il s'agit donc de « médecins traitants » pour les maladies les plus courantes.

Tisaner : Comme son nom l'indique le tisaner est un préparateur de tisanes.

Gériser : Le mot Gériser provient du français « guérisseur ». Les gériser sont plus habiles que les simples Tréters ou les tizaners. Ils utilisent non seulement les plantes aux propriétés médicinales mais aussi des incantations, des prières, et même des techniques de massage qui peuvent conduire à la guérison du malade.

Deviner : Ce sont des divinateurs, des diseurs de bonne aventure passé maîtres dans les arts divinatoires.

Sigider : Ceux-ci sont des divinateurs spécialisés dans une technique particulière de divination : la divination par les graines.

Grater tiboi : On arrive ici dans le domaine de la sorcellerie. Les grater tiboi sont des sorciers qui grattent du bois pendant leurs rituels.

Bater-d bobine : Une autre catégorie de sorciers utilisent le tambour indien en forme de sablier, la bobine.

Mazigador : Ce terme désigne littéralement un « magicien ».

Bien sûr, il existe beaucoup d'autres spécialisations un peu comme en Europe avec les barreurs de feu, les faiseurs de secrets, les magnétiseurs, les guérisseurs, les rebouteux, les énergéticiens, les féticheurs africains et autres marabouts et raquis qui pratiquent la roqya. Cependant, les pratiques de médecine non conventionnelle et de magie noire, parfois même d'exorcisme, sont souvent mélangées. Il n'y a pas de distinction aussi claire que dans nos cultures manichéennes. Non seulement la même personne peut pratiquer les deux types de magie / guérison, mais on peut retrouver différentes méthodes au sein d'un même traitement, ce qui provoque parfois une certaine confusion dans la population formatée à l'éducation occidentale. C'est ainsi que des guérisseurs utilisant uniquement l'herboristerie sont parfois confondus avec des sorciers. Mais dans une culture plus ouverte telle que la culture africaine d'Afrique Noire, cela ne pose aucun problème et est parfaitement admis.

Les trois types de sorcellerie principaux à la Réunion

On peut classer les sorcelleries pratiquées à la Réunion en trois groupes principaux dont le premier rassemble les sorciers malabars (ou sorciers malbars). Ceux-ci sont les descendants des indiens qui venaient de la côte de Malabar. Mais par extension, les malbars désignent tous les réunionnais d'origine indienne.

Le second groupe correspond aux sorciers comoriens, qui, comme son nom l'indique, correspond à une sorcellerie originaire de l'archipel des Comores, à l'ouest de Madagascar, proche des côtes africaines.

Le dernier groupe correspond à tout le reste et on lui a donné le nom de « sorcellerie blanche » qui est pratiquée par les « sorciers blancs ». Contrairement aux deux premiers groupes, cette sorcellerie ne correspond pas à un groupe ethnique en particulier ni à un type de magie particulier (ce n'est pas de la magie blanche).

Les sorciers Comoriens

Les Comoriens ne représentent qu'environ 5% de la population de la Réunion mais ils sont très réputés pour leurs sorciers jugés très puissants et dangereux. La force de cette sorcellerie n'est pas uniquement reconnue par la population mais également par les autres sorciers qui attribuent leurs échecs à l'Esprit Comore contre qui ils ne peuvent lutter à force égale.

Les esprits manipulés par les sorciers comoriens sont inconnus des Réunionnais. Le secret est rudement gardé par les sorciers. Ceci contribue encore plus à la crainte que tout le monde éprouve face à ces forces mystérieuses.

On rencontre beaucoup de femmes sorcières qui pratiquent les accouchements et sont spécialistes des problèmes d'infertilité. Leurs pratiques sont très différentes de celles des sorciers Malbars. En effet, elles utilisent une batterie impressionnante de potions magiques, de lotions, d'huiles, de parfums, et également d'une décoction mystérieuse où surnagent de nombreuses ailes de papillons.

D'origine spécifiquement africaine, la sorcellerie comorienne manipule des bâtons appelés « tibois ». Ils servaient à l'origine de technique divinatoire. Même si certains continuent de pratiquer cette divination ancestrale, l'utilisation de ces bâtonnets s'est essentiellement stylisée dans le geste qui a ensuite été copié par de nombreux sorciers ne connaissant plus réellement les véritables techniques. Ils se contentent de tailler des copeaux de bois dans ces bâtonnets en les nommant en fonction de leur forme et en inventant des prédictions. Mais il est très difficile de reconnaître le vrai du faux et chacun a appris à s'en méfier.

Les sorciers Blancs

L'appellation de « sorcier blancs » ne désigne pas la magie blanche, ni la magie effectuée par les créoles blancs et les Zoreils (métrolpolitains). Elle rassemble toutes les micro-sorcelleries ne provenant pas d'une ethnie particulière et on y rencontre toute sorte de choses. Ces sorcelleries recouvrent un éventail des plus varié de techniques qui semblent issues d'autres sorcelleries authentiques qui peuvent aller du vaudou à l'acupuncture chinoise.

Les sorciers blancs utilisent abondamment les tisanes et des médications que l'on pourrait qualifier de « remèdes de bonne femmes ». L'herbe de Saint Paul, ou plante « colle-colle » est appelée « guérit-vite » ; elle est utilisée pour soigner les maladies et les problèmes de peau (plaie, eczéma, furoncle, acné, gale, brûlure, démangeaison, zona, etc.). On s'en sert pour les plaies en tant que cicatrisant mais les chinois la considèrent comme hautement toxique et son usage ne doit être qu'externe. La graine de papaye est également utilisée par les sorciers blancs.

Les « Sinp » sont presque systématiquement administrés en même temps que des prières sont récitées. Il existe également un cérémonial pour effectuer la cueillette qui s'apparente au cérémonial des druides pour récolter le gui ou l’œuf serpentin. Ce doit être fait à des heures bien précises de la journée et à des endroits particuliers, et par le malade lui-même. C'est pour les réunionnais une manière d'aller soi-même activement vers la guérison par la mobilisation métaphorique de la volonté de guérir du malade.

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