Histoire d'un Vampire de Candie

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Ricaut, qui voyagea dans le levant, au XVIIe siècle, ajoute (3) que la peur des Broucolaques est générale aux Tures comme aux Grecs. Il raconte un fait qu'il tenait d'un Caloyer Candiot, qui lui avait assuré la chose avec serment. Un homme étant mort dans l'île de Milo, excommunié pour une faute qu'il avait commise dans le Morée, fut enterré sans cérémonies dans en lieu écarté, et non en terre sainte. Les habitants furent bientôt effrayés par d'horribles apparitions, qu'ils attribuèrent à ce malheureux : on ouvrit son tombeau au bout de quelques années ; on y trouva son corps enflé, mais sain et bien dispos ; ses veines étaient gonflées du sang qu'il avait sucé : on reconnut là un Broucolaque ou Vampire. Lorsqu'on eut délibéré sur ce qu'il y avait à faire, les Caloyers furent d'avis de démembrer le corps, de le mettre en pièces, et de le faire bouillir dans le vin ; car c'est ainsi qu'ils en usent de temps très-ancien envers les corps des Vampires.


Mais les parents du mort obtinrent, à force de prières, qu'on différât cette exécution ; et cependant ils envoyèrent en diligence à Constantinople, pour obtenir du patriarche l'absolution dont le défunt avait besoin. En attendant le corps fut mis dans l'église, où l'on disait tous le jours des prières pour son repos. Un matin que le Caloyer dont on a parlé faisait le divin service, on entendit tout d'un coup une espèce de détonation dans le cercueil : on l'ouvrit ; et l'on trouva que le corps était dissout, comme doit l'être celui d'un mort enterré depuis sept ans. On remarqua le moment où le bruit s'était fait entendre ; c'était précisément l'heure où l'absolution accordée par le patriarche avait été signée.

Les Grecs et les Turcs s'imaginent encore que les cadavres des Broucolaques mangent pendant la nuit, se promènent, font la digestion de ce qu'ils ont mangé, et se nourrissent réellement. Ils content qu'en déterrant ces Vampires on en a trouvé qui étaient d'un coloris vermeil, et dont les veines étaient tendues par la quantité du sang qu'ils avaient sucé ; que lorsqu'on leur ouvre le corps ces spectres jettent des ruisseaux de sang, aussi chaud, aussi bouillant, aussi frais que serait celui d'un jeune homme d'un tempérament sanguin. Cette opinion populaire est si généralement répandue, que tout le monde en raconte des histoires circonstanciées.


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