L’école de magnétisme

Magnétisme
Jusqu'à ces dernières années, la profession de magnétiseur était une profession presque inavouable.

Ne reposant sur aucune base scientifique, mal compris dans ses causes, souvent exagéré dans ses effets par des praticiens aussi enthousiastes que maladroits, déconsidéré par de nombreux charlatans qui ne cherchaient qu'à exploiter la crédulité publique, nié par le plus grand nombre des médecins et des savants qui refusaient même de constater la réalité de ses phénomènes, le Magnétisme restait dans le domaine de l'empirisme quand on ne le plaçait pas au rang des fourberies ou des attrape-nigauds. Et il en résultait toujours que le chercheur le plus instruit, comme le praticien le plus habile et le plus désintéressé, y laissait toujours de sa réputation, non seulement en se disant magnétiseur mais en étudiant le magnétisme dans un but purement scientifique ou humanitaire.

Pour se décider à embrasser ouvertement la profession de magnétiseur, il fallait donc être bien persuadé des services que l'on pouvait rendre à l'humanité, être animé par un courage à toute épreuve uni à un désintéressement sans bornes ; avoir pour cela une véritable vocation, et surtout une confiance illimitée dans l'avenir qui doit, tôt ou tard, apprécier à leur juste valeur les hommes et les choses du passé.

Les cours de Mesmer et du Baron du Potet

A différentes reprises depuis Franz-Anton Mesmer, le premier vulgarisateur du magnétisme et fondateur de la théorie du magnétisme animal, des magnétiseurs estimés ont fait des cours de magnétisme ; mais ces cours ne consistaient guère qu'en expériences pour amuser la galerie, en conférences et en causeries. Il n'y eût guère que le Baron du Potet qui ait fait des cours de quelque valeur, dans le but de faire des guérisseurs ; dans tous les cas, il fut le plus grand vulgarisateur, le Maître qui fit le plus grand nombre d'élèves; et on doit le reconnaître, le plus grand nombre de bons élèves.

Les élèves venaient, d'autant plus nombreux que le professeur jouissait d'une estime plus grande, payaient parfois fort cher, pour entendre un cours en 8, 10 ou 12 leçons. Avec plus ou moins d'enthousiasme, le Maître parlait d'abord devant les élèves des résultats obtenus dans sa pratique, commentait les propositions de Mesmer, discutait les rapports rédigés pour ou contre le magnétisme par les commissions des sociétés savantes nommées à cet effet, parlait emphatiquement du fluide magnétique et de la lucidité somnambulique, démontrait de son mieux les procédés qu'il employait, et le cours se terminait ordinairement par des causeries familières entre le maître et les élèves.

Mais les cours n'étaient jamais soumis à aucun contrôle ; il n'y avait pas de programme, pas de critique, pas d'examen et nulle consécration officielle, même pas celle d'une simple société d'études ou de vulgarisation.

C'était déjà quelque chose ; il y avait là une émulation susceptible peut-être de décider parfois une vocation; mais on ne pouvait pas considérer cela comme un enseignement professionnel. Il était impossible de faire de nombreux élèves dignes de la confiance des malades et certainement ceux qui devinrent de bons magnétiseurs le durent plus à leurs bonnes dispositions et à leur talent d'observation qu'à ce qu'ils pouvaient avoir appris de la bouche même du Maître.

Le Congrès magnétique international

Le Congrès magnétique international qui eut lieu à Paris en 1889, en réunissant les théoriciens avec les praticiens, a présenté le Magnétisme sous un jour nouveau qui a contribué dans une très large mesure à le faire prendre au sérieux. Ce fut un véritable tournant dans l’histoire du magnétisme.

Dans le but de former des élèves capables de donner aux médecins et aux malades toutes les garanties désirables, tant au point de vue moral que sous le rapport des connaissances théoriques et pratiques, la fondation d'une École de magnétisme curatif y fut décidée. La bonne harmonie qui n'a jamais eu lieu entre les magnétiseurs que pendant la courte période du Congrès, ne devait pas durer. La dissension se mit de nouveau dans leurs rangs et les plus ignorants devinrent d'autant plus jaloux et plus médisants que certains efforts étaient mieux couronnés de succès.

Pour diviser davantage encore la corporation que l'on aurait dû chercher à former, une société nouvelle se fonda, pour continuer, disaient les organisateurs, les traditions du Congrès et mettre ses décisions à exécution. La société, ne pouvant s'organiser sur des bases solides disparut bientôt, et l'on crût que le bénéfice moral des remarquables travaux du Congrès serait à jamais perdu.

Les prémisses d’une école de magnétisme

Hector Durville
Sachant que « l'union fait la force », au commencement de 1893, M. Hector Durville cherchait encore à rapprocher les meilleurs praticiens pour leur proposer de réaliser ensemble le vœu du Congrès de 1889 relatif à l'enseignement du Magnétisme. Il tenait essentiellement à ce que la nouvelle école, quoique indépendante par elle-même, fut placée sous le patronage d'une société qui avait déjà donné des preuves nombreuses de sa vitalité et de son dévouement à la cause. C'est pour cette raison qu'en avril, il demandait en ces termes à la Société magnétique de France de vouloir bien prendre en considération le projet résumé dans la note suivante :

« Sur la proposition de M. l'abbé de Meissas, le congrès magnétique international de 1889 a émis le vœu qu'une École de magnétisme curatif soit fondée à Paris pour les élèves des deux sexes. »

« Ce vœu, malgré le besoin qui se fait de plus en plus sentir, n'a pas été réalisé. Je propose à la Société de vouloir bien mettre à l'étude la réalisation d'un projet analogue qui consisterait dans la fondation d'une École pratique libre de magnétisme. L'enseignement serait divisé on deux parties distinctes : 1° partie théorique, 2° partie pratique. »

« L'enseignement théorique comprendrait une série de cours où seraient données les notions de l'anatomie, de la physiologie et de la pathologie ; l'histoire du magnétisme avec l'exposé de toutes les théories émises depuis Paracelse jusqu'à nos jours; les pratiques du massage. En dehors des cours réguliers, des conférences seraient faites sur la morale dans ses rapports avec l'art de guérir, la psychologie, l'occultisme, le spiritisme et les divers sujets qui se rattachent au magnétisme. »

« L'enseignement pratique serait donné dans une clinique où les élèves pourraient s'exercer, sous la direction des professeurs, magnétiseurs ou médecins, chargés du traitement des malades. »

« Après avoir suivi les cours théoriques et pratiques pendant un temps déterminé, les élèves subiraient un examen, en présence d'un jury spécial, et ceux qui auraient les aptitudes suffisantes recevraient un diplôme. »

La proposition de M. Durville fut prise en considération et une commission de cinq membres fut immédiatement nommée dans le but d'étudier son projet et de présenter un rapport circonstancié.
 

Le rapport de la Société magnétique de France

A la séance du 27 mai, ce rapport fut lu et adopté. Après avoir exposé des considérants qui justifiaient la nécessité de la mise à exécution du projet, indiqué sommairement le programme de l'enseignement, les rapporteurs s'exprimaient ainsi au sujet de l'organisation de l'École.

« Avec le concours des magnétiseurs, ce projet nous parait facile à réaliser.

« Après avoir étudié différents modes d'organisation, nous avons donné la préférence à une sorte d'association qui serait composée, d'une part, des professeurs chargés de donner l'enseignement théorique et pratique du Magnétisme et des sciences qui s'y rattachent; d'autre part, des élèves suivant les cours et de tous ceux qui s'intéressent au succès matériel et moral de l’œuvre.

« La réunion des professeurs, des élèves diplômés, qui continueraient à faire partie de l'Association et des membres s'intéressant au succès de l’œuvre composerait le Conseil supérieur de l'École, qui serait convoqué chaque année en assemblée générale, pour régler les questions relatives à l'enseignement, à la direction et à l'administration.

« Les membres de l'Association auraient voix consultative la première année, ils auraient voix délibérative à partir de la seconde. Pour cette année, les membres inscrits d'ici au 15 septembre auraient voix délibérative.

« L'Association serait dirigée par un comité de 9 membres nommé pour 3 ans, qui se renouvellerait par tiers chaque année. Les membres sortants seraient rééligibles. Un secrétaire perpétuel chargé de l'administration serait adjoint au comité directeur. Il assisterait à toutes les réunions, mais n'aurait voix délibérative qu'en l'absence de l'un des membres.

« Les professeurs seraient choisis au sein de l'École parmi les élèves diplômés qui continueraient à faire partie de l'Association. Les postulants au professorat soutiendraient publiquement une thèse, sur un sujet de leur choix ayant trait à l'agent magnétique et à ses applications au traitement d'une ou de plusieurs maladies, et le titre de Professeur serait ensuite conféré au Concours. »

Comme on le voit, l’École devait être une sorte d'association mutuelle conclue, d'une part, entre les magnétiseurs indépendants ; et, d'autre part, entre les élèves et ceux qui s'intéressaient au succès de l’œuvre; et la Société magnétique de France ne lui donnait qu'encouragement et protection. L'association ainsi comprise devait réellement constituer l’École pratique de Magnétisme de Paris, avec une organisation aussi indépendante que possible.

Les premières réunions de magnétiseurs

Au nom de la Société, des convocations furent faites dans ce sens à tous les membres du Congrès magnétique international de 1889 et à tous les magnétiseurs indépendants. Les principaux membres du Congrès, abandonnant leur projet, ne répondirent pas ; et quelques magnétiseurs indépendants se rendirent seuls à l'invitation, avec les membres de la Société. Le rapport des commissaires fut lu, discuté et adopté dans son ensemble comme base de la future organisation de l’École et d'autres réunions d'études furent immédiatement décidées.

Mais, bientôt les plus turbulents voulurent modifier les grandes lignes du projet et se partager à l'avance tous les avantages sans s'engager d'une façon formelle à remplir toutes les charges de professorat et autres y afférentes. C’était le début d’une fronde. Enfin, dans une dernière réunion, d'ailleurs fort peu nombreuse, il fut impossible d'assurer les services de l’École et le bon fonctionnement de celle-ci, tant au point moral qu'au point de vue matériel, et un deuxième rapport à la Société fut rédigé par MM. le docteur Encausse (Papus), Rouxel, Démarest et Durville. Dans ce document, qui traçait définitivement l'organisation de l'École sous une autre forme, les rapporteurs s'exprimaient ainsi.

La fondation de l’école de magnétisme

« Les organisateurs de l’École pratique de Magnétisme ont convoqué, a trois réunions successives, les principaux magnétiseurs et magnétistes de Paris dans le but d'élaborer les statuts de l'Association.

« Considérant,

« Que le peu d'empressement mis par le plus grand nombre d'entre eux à partager nos travaux, rend irréalisable, dans sa forme primitive, le projet que vous avez accepté,

« Nous vous proposons :

« 1° De fonder l’École en vous dégageant de toute coopération étrangère ;

« 2° De confier la direction à votre secrétaire général rendu apte à cette tâche par vingt années de pratique et d'études scientifiques.

« Votre École, désignée ainsi qu'il suit : École pratique de Magnétisme, dirigée par le professeur H. Durville, sous le patronage de la Société magnétique de France, serait régie conformément au règlement statutaire suivant ; etc. etc.. »

Ce rapport, lu et discuté dans la séance du 24 juin, fût adopté à l'unanimité, et l'École fut inaugurée le lundi 2 octobre 1893, à la Société magnétique de France, en présence des élèves, des membres de la Société et de quelques invités. »

Ecole de magnétisme de Paris

La première année de cours

Les cours furent faits régulièrement avec un dévouement qui fait honneur aux professeurs pendant l'année scolaire 1893-94; et en octobre 1894, après une année complète d'études, le premier examen eut lieu publiquement pour la délivrance des diplômes, devant une commission nommée par la Société.

Les examens devaient être sévères. Aussi, 5 élèves seulement se présentèrent et quatre reçurent le diplôme. Il fut en outre remis un Premier Prix d'Instruction théorique et pratique à M. Ph. Renaud et un Second Prix à M. Ouiste, qui s'étaient particulièrement distingués. Comme compensation, 29 des autres élèves, qui avaient le plus assidûment suivi les cours, reçurent un Certificat d'Inscription à l’École.

L’école devient une école de massage

La direction de l'Ecole voulait étendre son programme d'enseignement et faire entrer le massage au rang des principaux cours [NdE : à présent il ne faut plus parler de massage mais de modelage ]. M. Durville proposait à la Société, dans sa séance du 26 mai 1894, de modifier ainsi qu'il suit le titre de l'Ecole : Ecole pratique de Magnétisme et de Massage, et de modifier également dans le même sens les articles du règlement statutaire de l'Ecole. Cette proposition ayant été adoptée à l'unanimité, le règlement ainsi modifié est devenu définitivement le règlement statutaire de l'Ecole et les diplômes ont été rédigés en conséquence.

Voir notre article détaillé sur la pratique des massages

Classée au rang des grands établissements de l'enseignement supérieur libre

Les cours de la deuxième année commencèrent en octobre 1894, et l'enseignement se poursuit avec un succès toujours croissant. Mais l’École pratique de Magnétisme et de Massage n'étant que l’École de la Société magnétique de France, n'avait pas d'autre consécration officielle.

M. H. Durville voulut faire ce qui dépendait de lui pour obtenir l'autorisation du gouvernement qui devait la classer au rang des grands établissements de l'enseignement supérieur libre. Après beaucoup de démarches inutiles, il fit une déclaration au Ministre de l'Instruction publique; mais le classement n'eut pas lieu. Il ne se rebute pas ; et en mars 1894, il fis une nouvelle déclaration sous une autre forme.

Après enquête et contre-enquête, le Ministre émit un avis favorable. Un rapport fut établi dans les bureaux et adressé au Conseil supérieur de l'instruction publique, puis à l'Académie de médecine qui donnèrent leur avis conforme, et le rapport fut envoyé par les soins du Ministre, Recteur de l'Académie de Paris, au vice-recteur qui fut chargé d'en assurer l'exécution.

Ce n'était pas tout. La décision prise par le vice-recteur de l'Académie de Paris, au nom du Ministre de l'Instruction publique, était encore subordonnée à des formalités. Après une publication légale et l'affichage pendant 10 jours, conformément à la loi : 1° à la Sorbonne ; 2° à la Préfecture de la Seine ; 3° au Parquet du procureur de la République, des oppositions pouvaient encore avoir lieu. Le délai de 10 jours passé sans opposition, la décision du vice-Recteur a force de loi.

C'est comme cela que l’École pratique de Magnétisme et de Massage fut définitivement classée parmi les grands établissements de l'enseignement supérieur libre, et que le programme de son enseignement s’est trouvé admis et reconnu par l’État.


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Cet article a été mis à jour pour la dernière fois le . Il est un peu ancien mais toujours d'actualité.