Les épreuves de l’initiation aux Mystères

Pyramides d'Egypte
Les diverses initiations sacerdotales étaient réservées aux postulants d'origine égyptienne. Les adeptes étrangers ne purent jamais ou presque jamais connaître les derniers Mystères. Les épreuves qu'ils devaient subir différaient également de celles que les Egyptiens connaissaient. Les postulants arrivaient aux galeries par un étroit passage pratiqué dans les murs de la grande pyramide. Cette ouverture, que Strabon a décrite avec quelque détail, existe encore de nos jours.

La descente dans le puits

Le récipiendaire parvenait, en s'aidant des pieds et des mains, au bord d'un puits dont il ignorait la profondeur. Là, son conducteur l'obligeait à descendre, au moyen d'une échelle fixée contre le mur.

Après un parcours de soixante pieds, au milieu des ténèbres, il s'engageait dans un couloir assez commode, mais sinueux et fortement incliné. Il abordait enfin, à sa grande satisfaction, au fond, du mystérieux abîme. Là se trouvaient deux portes grillées. L'une était au nord et l'autre au midi. A travers les barreaux de cette dernière le postulant découvrait une longue suite d'arcades, que des lampes funèbres éclairaient. C'était la demeure des morts. Les prêtres et les prêtresses se réunissaient tous les jours sous les voûtes obscures de cette vaste et silencieuse nécropole, pour y chanter des hymnes en l'honneur de Dieu et de ceux dont la vie s'était écoulée dans la pratique de la vertu. Paul Lucas a visité ces grottes souterraines, dont quelques-unes étaient habitées de son temps par des familles coptes.

Le couloir souterrain

L'aspirant ne devait pas s'arrêter là. Son introducteur le conduisait sans rien dire à la porte du nord, qui s'ouvrait sans difficulté. Les deux battants, en se rejoignant, produisaient un bruit étrange, que les échos répétaient jusqu'à l'extrémité du souterrain.

Les prêtres, ainsi prévenus qu'un étranger s'engageait dans les épreuves de l'initiation, préparaient tout pour le recevoir.

Après avoir marché pendant quelque temps, le récipiendaire apercevait une inscription ainsi conçue :

Quiconque fera cette route sans regarder et sans retourner en arrière, sera purifié par le feu, par l’eau et par l'air, et s'il peut vaincre la frayeur de la mort, il sortira du sein de la terre, reverra la lumière et aura droit de préparer son âme à la révélation des mystères de la grande déesse Isis.  

Si le postulant persévérait, après avoir lu cette inscription, l'initié qui l'avait accompagné jusque-là se retirait, se bornant à le surveiller de loin, sans qu'il s'en aperçût, afin de lui porter secours, dans le cas où son courage viendrait à défaillir.

Lorsque le fait se produisait, ce qui n'était point rare, il ramenait le candidat au lieu du départ, en le prévenant qu'il n'eût à se présenter dans aucun temple d'Egypte pour être initié aux Mystères.

La porte de fer

Celui qui persévérait dans sa résolution était tout étonné de marcher, pendant près d'une heure, sans rien découvrir de nouveau. Puis, il se trouvait tout à coup en face de trois hommes armés, debout à côté d'une porte de fer. L'un d'eux, faisant quelques pas vers le nouvel arrivant, lui adressait ces paroles :

Nous ne sommes point ici pour vous empêcher de
« passer. Continuez votre route, si vous en avez la force.
« Je dois vous prévenir toutefois que dans le cas où vous
« rétrograderiez, nous vous arrêterions et vous ne
« sortiriez jamais de ces lieux. Songez surtout que vous ne
« pourrez arriver au but qu'en vous frayant un passage
« à travers de nombreux et terribles obstacles.
 

Si l'aspirant ne se laissait pas rebuter, son guide cessait de le suivre, et allait avertir les prêtres des sentiments qu'il avait remarqués en lui.

L’épreuve du feu

Après un trajet assez long, l'étranger apercevait dans le lointain une vive lueur. Parvenu à l'endroit d'où partait la lumière, il voyait en face de lui une voûte longue et spacieuse, assez semblable à une fournaise ardente. Les flammes, après s'être élevées à environ deux mètres de hauteur, se recourbaient en forme d'ogive au-dessus du couloir qu'il avait à parcourir.

Il était à peine sorti de ce foyer ardent, qu'il lui fallait traverser une grille de fer rougie et formée de losanges, entre lesquels il n'y avait que la place du pied. Là finissait l'épreuve du feu.

L’épreuve de l’eau

Celle de l'eau commençait immédiatement après. Le candidat devait franchir un canal dont le courant se précipitait avec un bruit formidable, soit en nageant, soit en s'aidant de deux rampes qui étaient placées dans la direction du souterrain. Celui qui reculait devant ces dernières épreuves était condamné à passer sa vie dans les temples sans recevoir l'initiation. On lui permettait néanmoins de se marier et d'écrire à sa famille. Les fonctions qu'il avait à remplir étaient celles d'officier subalterne.

Lorsqu'il était parvenu de l'autre côté du canal, il se voyait comme enfermé entre deux murs d'airain. Au fond apparaissait une porte revêtue d'ivoire. De chaque côté, une grande roue que faisait mouvoir un mécanisme secret.

L'aspirant poussait la porte, qui résistait. Après un examen attentif, il distinguait deux anneaux d'acier poli, qu'il saisissait, en appuyant dessus. Les roues se mettaient aussitôt en mouvement, tandis que le pont-levis étroit sur lequel il était debout s'abaissait avec rapidité. Obligé de se tenir cramponné aux anneaux, le malheureux se sentait emporté dans le vide.

Le sanctuaire

Un courant d'air violent soufflait sur lui et éteignait la lampe dont il s'était servi pour éclairer sa marche. Entouré de ténèbres, il n'entendait plus que le bruit terrifiant des machines qui tournaient dans leurs engrenages de fer. Puis, le linteau s'abaissait doucement et le déposait devant la porte d'ivoire, qui s'ouvrait d'elle-même.

Les prêtres, vêtus de robes de lin, venaient alors au-devant de lui, et le recevaient dans une salle qui précédait le sanctuaire.

L'hiérophante lui adressait quelques paroles empreintes de bienveillance, et le félicitait de son courage. Il lui offrait ensuite une coupe d'eau du Nil :

Que cette eau, lui disait-ii, soit pour vous comme l'eau du Léthé. Puisse-t-elle vous faire oublier les fausses maximes que vous avez entendues de la bouche des profanes !  

Le candidat se prosternait devant la statue d'Isis, et le grand prêtre ajoutait :

Isis, ô grande déesse des Egyptiens, donnez votre
« esprit au nouveau serviteur qui a surmonté tant de
« périls pour se présenter à vous. Faites qu'il triomphe
« également des épreuves qu'il aura à subir de la part de
« ses passions, s'il veut devenir meilleur. Rendez-le
« docile à vos lois, afin qu'il mérite d'être admis à vos
« augustes Mystères.
 

Tous les prêtres répétaient en chœur le vœu de l'hiérophante.

Puis ce dernier poursuivait, en présentant au néophyte une liqueur réconfortante :

Que ce breuvage vous fasse garder le souvenir de
« votre initiation et voua aide à pratiquer les vertus
« qu'elle vous impose.
 

Cela fait, on le conduisait dans l'appartement qui lui était réservé et on lui donnait tous les soins que réclamait son état.

Le baptême

Lorsqu'il était remis de ses fatigues, l'hiérophante le condamnait à un jeûne rigoureux de plusieurs mois. Il suivait, en même temps, les conférences que les prêtres faisaient à son intention.

Le jour de l'initiation venu, le chef de la caste sacerdotale adressait au récipiendaire un discours sur l'unité de Dieu, l'immortalité de l'âme, et la nécessité, pour le sage, de vaincre ses passions.

L'initié prêtait serment de ne pas révéler ce qui avait trait aux mystères, déclarait que rien, dans les épreuves, ne lui avait paru inutile ou peu sérieux, et recevait une sorte de baptême, que lui administrait le prêtre spécialement chargé de ce genre de ministère.

L’Hydranos, ou aspergeur, le faisait déshabiller jusqu'à la ceinture, le conduisait près d'une cuve remplie d'eau de mer, dans laquelle on avait jeté du sel, de l'orge et du laurier, et lui arrosait la tête en disant :

Puisse cette eau, symbole de la pureté, effacer les souillures de votre chair, et, en vous rendant votre candeur et votre première innocence, purifier vos sens, ainsi que la vertu doit purifier votre âme !  

L’enseignement des mystères

La cérémonie achevée, l’Uydranos revêtait le néophyte d'une robe blanche. Alors seulement, ce dernier pouvait pénétrer dans le sanctuaire. Il y était introduit au son des instruments, après être resté quelque temps plongé dans d'épaisses ténèbres, que sillonnaient des éclairs accompagnés de tonnerres.

L'initiation de l'étranger n'était pas complète. On lui insinuait plutôt qu'on ne lui affirmait les dogmes religieux dont j'ai déjà parlé. L'étude des sciences laissait aussi beaucoup à désirer. Seules les intelligences d'élite parvenaient à combler une partie de ces lacunes par le raisonnement et la méditation.

La croyance en la vie future lui était enseignée, mais en tenues assez vagues. Aussi quelques philosophes grecs, et à leur tête Pythagore, ont-ils professé la métempsycose, que les prêtres Égyptiens repoussaient comme une erreur.


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